Comment apprendre ou développer sa compétence en coaching d’équipe ?
Il y a bien des façons de pratiquer notre métier, bien des voies pour
continuer à l’apprendre et à se professionnaliser. Une de ces voies se
fonde sur le développement de la conscience, le développement de
« notre » conscience. Plus notre conscience de nous-mêmes grandit, plus
notre perception des situations est claire (vs déformée) et mieux nous
en percevons les enjeux, en d’autres termes « ce qui s’y joue ».
Au fur et à mesure du développement de notre discernement, nous devenons
capables d’intervenir de façon plus judicieuse, plus précise, plus
sobre, plus ajustée au besoin de l’instant. Or, c’est bien dans
l’adéquation de l’intervention à ce qui fait problème que réside la
valeur et la réussite de notre intervention. C’est ce qu’illustre
l’histoire racontée par Eric Berne du chauffagiste, le seul à parvenir à
remettre la chaudière en marche, qui facture 1 $ pour « donner le coup
de marteau » et 99 $ pour « savoir où donner le coup de marteau ».
Ceci dit, aspirer au développement de la conscience ne signifie pas
nécessairement devenir rigide sur le fait d’être conscient ou, dit
autrement, ne pas tolérer son inconscience. Heureusement, car nous avons
tous vérifié, un jour ou l’autre, le postulat de l’approche « Elément
Humain » selon lequel nos rigidités sont la source principale de nos
problèmes et l’ennemi n°1 de la collaboration en groupe.
Pour ma part, un des aspects de l’accompagnement de groupes que j’aime
le plus est la complexité de ce qui s’y passe. Elle tient pour moi de la
dimension du Mystère. J’aime ce parfum de mystère, cette impression que
bien des éléments me dépassent. Que mon aire de jeu soit circonscrite
aux seuls affleurements des problématiques en cours, n’entame en rien
mon plaisir d’y jouer ma partition. Comme le surfeur se réjouit de
glisser sur la vague sans comprendre tout ce qui se passe dans l’océan,
comme le médecin accoucheur se passionne pour l’accompagnement de la
gestation puis de la mise au monde d’un enfant sans avoir perçu la
totalité des manifestations de la vie à l’œuvre pendant les 9 mois de la
grossesse de la mère.
Et puis, se réjouir de ce mystère et donc de notre inconscience, nous
allège de notre éventuel projet de « maitriser le processus »
(expression que l’on entend parfois dans notre communauté) qui est
surtout au service de notre imaginaire de toute-puissance.
La question qui nous intéresse à ce stade pourrait donc être formulée de
la façon suivante : comment développer ma conscience de moi pour
apporter une contribution personnelle ajustée aux situations
d’accompagnement de groupe dont une part m’échappe intrinsèquement ?
Cette question nous amène à nous demander : comment puis-je développer
ma conscience de moi en rapport aux situations de groupe ?
Et le questionnement peut se poursuivre par :
Est-ce à travers la lecture de livres sur le sujet ?
La réponse selon moi : probablement assez peu.
Est-ce en suivant des formations didactiques sur le sujet ?
selon moi : sans doute faiblement.
Est-ce par l’expérience de situations de groupe, par la confrontation au
réel des groupes ou même par la pratique de l’accompagnement de groupes
?
selon moi : Oui, il semble que ce soient des conditions plus adéquates.
On se demande alors : où vais-je pouvoir faire l’expérience de groupe,
me confronter au réel du groupe en vue d’augmenter ma conscience de moi
dans un contexte collectif ?
Si toutes les situations de vie de groupe qu’elles soient familiales
(réunions de famille, repas en famille, anniversaires, etc…), amicales
(dîners, sorties, vacances, etc…), associatives (vie de bureaux, de
comités, d’assemblées, etc…) peuvent être porteuses d’expériences,
d’enseignements voire de prises de conscience, certains dispositifs
fournissent des conditions orientées spécifiquement vers le
développement de la conscience. Je pense notamment aux espaces de
thérapie de groupe, de séminaires de développement personnel, aux
retraites spirituelles, etc….
Mais ces espaces fournissent-ils des occasions de pratiquer l’accompagnement de groupe ? En général, non.
Alors où trouver de tels espaces ?
Dans mon expérience, l’idéal, est le « compagnonnage ». L’apprentissage
est plus rapide et plus fructueux en la présence d’une personne plus
expérimentée sur ce chemin de la conscience, ce chemin de
l’accompagnement de groupes « en conscience ». C’est ce que j’ai connu
auprès de Vincent lorsque j’étais jeune consultant salarié de
Transformance dans les années 1993, 1994, 1995. C’est que je propose
moi-même depuis 20 ans aux confrères, indépendants ou associés dans mon
entreprise, auxquels je fais appel pour des missions d’accompagnement
qui requièrent d’intervenir à plusieurs.
Le professionnel aguerri va modéliser, expliquer, critiquer, ajuster …..
mais aussi accompagner le jeune coach dans les prises de conscience de
ses fonctionnements réveillés par les situations de groupe rencontrées.
L’intervention auprès d’un système (équipe ou organisation), nous expose
intrinsèquement à la transmission d’un virus qui n’est autre que le(s)
pattern(s) des systèmes accompagnés. Cette transmission n’est possible
que si le terrain, ici le ou les coach(s), est porteur du même « germe »
à l’état latent ou en sommeil. Or, nous avons tous fait ce constat que
les clients qui se présentent à nous sont bien souvent sollicités sur
des thèmes qui sont aussi nos propres objets de travail du moment. On
peut donc en déduire que les interactions avec les interlocuteurs du
système vont souvent activer les rigidités du coach et avec elles, ses
peurs et ses failles d’estime de soi inconscientes. En ce sens, ces
situations représentent de formidables opportunités de prendre
conscience d’aspects occultés, refoulés de soi-même. La présence d’un
professionnel aguerri au côté du jeune coach va permettre à celui-ci de
saisir ces opportunités pour favoriser l’augmentation de sa conscience
de lui-même sur ses rigidités, peurs, failles d’estime de soi réveillées
dans la relation avec le système client. Le coach expérimenté va aider
le plus jeune à se « mettre en travail » sur ces zones d’ombres qui
déforment sa perception de la réalité et en conséquence diminuent la
pertinence et l’utilité (je préfère à « efficacité ») de ses
interventions.
Le « mettre en travail » ou plutôt l’aider à saisir les occasions
présentées par la vie pour qu’il « se mette en travail », est une des
valeurs ajoutées majeures de « l’ainé dans le métier » pour le jeune
coach, en plus de celle d’offrir une atmosphère de réconfort et
d’encouragement pour adoucir l’effet corrosif de la remise en question
et d’offrir une guidance dans certaines de ses tentatives.
Pour toutes ces raisons, le compagnonnage est le dispositif idéal pour
développer ses compétences et son envergure de coach d’équipe dans cette
orientation de l’accroissement de la conscience de soi ……… à condition
que l’on ait des affinités avec cette orientation, autrement dit, que
l’on soit sincèrement en quête d’une plus grande conscience de lui-même.
Cependant, comme je l’ai déjà écrit sur ce réseau, le compagnonnage
n’offre de la place qu’à un petit nombre d’élus alors que de nombreux
coachs le recherchent. C’est pourquoi, il devient si précieux d’offrir
d’autres dispositifs qui, eux, peuvent s’ouvrir à un plus grand nombre
de professionnels. C’est ce que peuvent proposer les séminaires Phase
one Elément Humain et une certaine catégorie de groupes de supervision.
Concernant les séminaires Phase one (le module 1 comme le module 2), ils
sont en effet des espaces où l’on peut faire l’expérience du groupe, se
confronter au réel du groupe en vue d’augmenter sa conscience de soi
dans un contexte collectif. Si l’approche Elément Humain s’est si bien
développée sur le marché du coaching en France, c’est bien notamment
grâce à l’adéquation de son orientation – la résolution des problèmes
par l’augmentation de la conscience de soi – avec une certaine pratique
de notre métier et les clés de son apprentissage. En faisant
l’expérience du processus du Phase One, la participant va être confronté
au groupe et prendre davantage conscience de ses fonctionnements en
groupe. Il va pouvoir aussi potentiellement profiter de l’aspect
modélisant du facilitateur dans sa façon d’accompagner le groupe et de
vivre la relation avec les participants et le groupe dans son ensemble
et ensuite essayer de transposer ce qu’il a observé de la pratique du
facilitateur dans ses propres missions d’accompagnement de collectifs.
Concernant le groupe de supervision, celui-ci peut, à certaines
conditions, offrir une dimension supplémentaire et déterminante dans le
développement des compétences du coach : un espace où ce dernier va
s’entraîner à pratiquer l’accompagnement de groupe. Il faut pour cela
que le dispositif de supervision offre aux coachs participants la
possibilité de faciliter certaines des séquences sous le regard du
superviseur. Cela reproduit alors des conditions proches du
compagnonnage et met notamment à disposition du participant 3 des
valeurs ajoutées majeures qu’un « ainé dans le métier » peut lui
apporter, comme je l’ai évoqué plus haut.
C’est un dispositif que je propose dans un de mes groupes de
supervision, celui spécialisé dans le coaching de collectifs. Lors de
chacune des journées, il y a 4 ou 5 séquences dont la facilitation est
déléguée. Ces séquences correspondent à des registres différents de
l’accompagnement de groupe.
Si je prends le modèle ORF de C&T, certaines séquences relèvent du
O, soit du registre de l’accompagnement du groupe en phase
« opérationnelle », autrement dit en phase d’élaboration collective,
certaines séquences relèvent du R, soit du registre de l’accompagnement
du groupe en phase de « régulation » c’est-à-dire en lien avec des
sujets concernant la vie du groupe et les relations interpersonnelles,
certaines séquences relèvent du F, soit du registre du groupe en phase
de « formation » à travers la présentation d’un modèle théorique qui va
favoriser la prise de conscience du groupe ou la présentation d’une
modalité de travail qui en facilitera la collaboration.
Si je prends le modèle ICO de l’Elément Humain, certaines séquences sont
relatives à des enjeux de groupe majoritairement lié à l’Inclusion,
d’autres à des enjeux de groupe majoritairement lié au Contrôle et
d’autres enfin à des enjeux de groupe majoritairement lié à l’Ouverture.
Ainsi, lors de chaque journée, 4 ou 5 volontaires ont l’occasion de
s’entraîner à des registres différents de l’accompagnement d’équipe et
comme il y a une rotation d’une journée sur l’autre, au bout de quelques
mois tous les participants ont eu l’occasion de s’entraîner à tous les
registres proposés, qu’ils soient ORF ou ICO.
Pour conclure, je précise qu’outre la délégation de la facilitation de
certaines séquences, d’autres aspects du dispositif de ce groupe de
supervision favorisent l’apprentissage ou le développement de son savoir
faire de coach de groupe. En particulier les conditions de
ressourcement qu’il offre, des séquences dédiées à la supervision
d’intervention en cours des participants et une atmosphère d’ouverture
propre au développement personnel de chacun. En cela aussi, ce
dispositif se rapproche beaucoup des conditions de compagnonnage.